L’aventure débute en l’an deux mille.
Elsa, la petite fille de Marie-Charlotte, vit dans une communauté religieuse en Guyane française. Elle rend annuellement une visite à sa grand-mère. Seulement, cet hiver-là, elle ne donne aucun signe de vie.
Accompagnée de ses deux meilleures amies d’enfance, Marie-Charlotte se résout à s’échapper de la maison de retraite, à sa recherche.
Moi, leur masseur, je décide, à leur demande très insistante de les suivre dans ce projet fou. Commence alors une véritable odyssée en Amérique du Sud, où rien ne va se dérouler comme prévu. Confrontés à de dangereux tueurs, nous allons connaître l’enfer, mais vivre aussi des instants mémorables dans cette zone équatoriale.
Meurtres, enlèvements, enquêtes, drames de la vie, exotisme, une bonne dose d’humour et des personnages décalés, constituent les points clés de ce roman.
Le Nouveau Monde.
Toute une palette de couleurs visibles depuis le hublot vint attiser ma curiosité. À l’approche de la terre ferme, la mer offrait des nuances de plus en plus turbides, dessinant presque un deuxième océan. J’aperçus un chapelet d’îles, sans doute celles où les bagnards avaient donné leur vie.
Un vert puissant succéda au blanc du sable ; la majestueuse forêt équatoriale venait d’envoûter le modeste terrien que j’étais. De petits toits colorés semblaient perdus dans cette immensité d’où se dégageaient par endroits des brumes flottantes.
Pour finir, ce fut l’ocre de la latérite bordant la piste d’atterrissage qui nous accueillit.
L’avion paraissait brouter jusqu’à sa fin de course, jusqu’à son accrochage au sas de la délivrance. C’était semblable au théâtre, des voyageurs se levaient en applaudissant le pilote, en montant les mains vers le ciel. Ils étaient comme moi, ils remerciaient Dieu d’être toujours en vie. Notre périple était encore loin d’être achevé.
Après avoir montré nos papiers aux policiers, il ne restait plus que l’interminable attente des bagages. Sirène s’esclaffa en voyant Marjorie s’irriter à la réception de son épuisette fêlée sur toute la longueur.
Je fus le premier des aventuriers à franchir, sous un ciel étoilé, l’ouverture vers le Nouveau Monde. Mon corps tout entier fut en une seconde happé par un air chaud et humide générant un début de sudation sous les aisselles. Cette lame de chaleur, sensation jusqu’alors ignorée, me traversa tout en caressant ma peau.
Dans ma subite et inédite jubilation, j’en oubliai mes compagnes de voyage, me mettant à rêver que j’étais seul, juste un simple vacancier en quête de séances de bronzage, en recherche d’une paix éternelle. Plongé dans une douce béatitude, je fus rapidement rattrapé par un harem de vieilles demoiselles joyeuses poussant des chariots chargés de bagages. Nous étions ainsi un convoi exceptionnel, accédant à la fin d’une première étape exténuante et étant disposés à passer une longue nuit de repos. Un pick-up noir nous attendait d’où en sortit une dame, pratiquement hystérique, se ruant et se jetant dans les bras d’une Sirène tout aussi euphorique. Elles ne cessaient plus les embrassades, piétinaient, sautillaient sur place, lâchant de petits cris inaudibles. Voilà, je faisais mes premiers pas dans l’univers amazonien, devenant l’acteur de ma nouvelle existence que j’allais devoir explorer.
Elle s’appelait Néna, femme de caractère, originaire de la République dominicaine, s’exprimant avec un accent singulier. Elle refusait de divulguer son âge prétextant qu’elle ne le connaissait pas. Mon premier contact avec elle fut indéfinissable, envoûtant, quasi platonique, comme si je découvrais une autre maman protectrice. Elle resplendissait en nous séduisant d’une voix ensorcelante, nous inondant d’ondes positives ainsi une sorte de rayon de soleil, traversant les couches sombres de la nuit. Elle était la patronne d’un petit hôtel de cinq chambres, coloré à son image, avec son restaurant aux tables tapissées de nappes en madras.
L’ensemble s’appelait le Soc Trang, comme le nom de l’une des provinces du Delta du Mékong au Viêt Nam.
Le pick-up démarra en trombe. Moi et Marjorie étions à l’arrière les yeux rivés vers le scintillement des étoiles. Sous cette latitude, le jour tirait très tôt et invariablement sa révérence, nous plongeant dans d’inouïs bruits nocturnes. Nous étions fatigués, ballottés, mais soulagés d’approcher notre nouvel univers. Au bout d’une vingtaine de minutes, le véhicule coupa son moteur face à un portail rouge. Ce sera sans nul doute mon premier repère pour identifier le secteur.
Immédiatement, j’eus cette impression de pénétrer dans une forêt de bonheur, tant la végétation y tenait une place prépondérante. Nous fûmes accueillis par les rires de personnes guillerettes, en goguette ; une joie communicative qui semblait rassembler les clients dans le meilleur des mondes, dans un univers pour ainsi dire familial.
Une femme au prénom de Nadine, très élégante, vêtue d’une robe au col Claudine, assez étonnant sous ces latitudes, habituée du lieu, ne cessait de m’en faire l’éloge. Elle m’initia au rock’n’roll jusqu’à ce que ma chemise n’ait plus un centimètre de sec. L’ambiance se métamorphosait au fil des heures électriques, dans une atmosphère très sud-américaine.
Ce premier soir, j’appris aussi la fabrication locale de Ti-punch, puis le combat avec une moustiquaire après que le rhum eut coulé dans mes veines et asphyxié une bonne moitié de mon cortex cérébral. J’étais devenu le prisonnier d’une toile d’araignée géante. Épuisés, nous nous couchâmes, sans défaire nos valises, sans nous brosser les dents ainsi des sortes de souillons.
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